La Garde Nationale à Marcolès

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Les états généraux sont à peine réunis que l'on commence à voir des ennemis partout, à l'extérieur comme à l'intérieur du pays. Aussi dans les villes comme dans les campagnes, l'on en vient vite à la création d'une milice.

Le 9 août 1789, lisons-nous dans le registre de délibérations de la commune de Marcolès, "les officiers de la municipalité. capitulairement assemblés" à la réquisition su syndic, décident "tant de leur propre mouvement pour l'intérêt et la sûreté des citoyens du corps commun de leur ville et paroisse, qu'en conséquence des avis à eux donnés de la part de Messieurs les officiers du conseil municipal de la ville d'Aurillac, capitale de la Haute-Auvergne", d'établir "une garde bourgeoise, tant de nuit que de jour, et surtout la nuit, pour veiller à la tranquillité publique, au bon ordre, à toute surprise de la part de toute sorte d'ennemis."

"Cette bonne et fidèle garde bourgeoise" commencera son service le jour même. "Quatre citoyens seront tenus tour à tour, ayant chacun un fusil armé de faire la garde et patrouille, ou de la faire faire à leurs frais, dans ladite ville de Marcolès et autour des fossés d'icelle, toute la nuit, et de visiter toutes les auberges pour arrêter toutes sortes de personnes indistinctivement, gens sans aveu, errants et vagabonds et perturbateurs du repos public, allants et venants (sic) et que ne seraient pas connus ou munis de bons certificats ou passeports, pour lesdites personnes être conduites devant Messieurs les officiers du conseil municipal d'Aurillac, à l'effet par eux d'ordonner ce qu'ils jugeront à propos".

Celui que refusera de monter la garde sera condamné à une amende de trois livres, qui sera employée en partie à payer le remplaçant du réfractaire et le surplus distribué aux pauvres ou consacré à l'achat de munitions. Le syndic, enfin, aidé du greffier, devra établir la liste des hommes de garde.

Dès maintenant on peut constater le rôle que joue et jouera la municipalité d'Aurillac dans nos affaires communales. Bien des choses se feront chez nous, uniquement pour suivre les indications ou ordres du district.

Le 24 août suivant, les membres du conseil municipal sont convoqués de nouveau pour prendre de nouvelles mesures au sujet de l'organisation de cette milice communale, pour se conformer cette fois, au décret de l'Assemblée Nationale du 10 août 1789, pour le rétablissement de la tranquillité publique.

Le corps municipal, pour employer l'expression même de l'époque, arrête ce qui suit:

1.. "Il sera à l'instant formé deux compagnies de milice bourgeoise, dans laquelle seront enregistrés quatre-vingt hommes ou environ, ou garçons de la paroisse, pris indistinctement depuis l'âge de 18 à 60 ans, c'est-à-dire un homme ou garçon de chaque maison où il y aura deux hommes et plus, capables de porter les armes, et en cas de besoin, de résister aux incursions de toutes sortes d'ennemis et de les repousser, à la charge, par ladite milice de se pourvoir d'armes nécessaires. En conséquence, le dit Corps municipal a, sur le champ, dressé un état de liste de tous les individus qui composeront ladite milice, lequel état a été celui tout fait et signé par tous les membres de la municipalité et ont ordonné qu'il sera annexé au registre de la municipalité".

2.. "Chaque milicien sera tenu de justifier présence du régiment sous les armes, de ne jamais abandonner leurs drapeaux, d'être fidèle à la Nation, au Roi et à la Loy, et de se conformer aux règlements militaires".

3.. "Cette milice sera commandée et obéira aux ordres de Messieurs d'Humières, chevalier de St-Lazare, seigneur de Marcolez, capitaine au régiment d'Orléans-dragons, et de M. de Méallet, fils, seigneur de Faulat, capitaine au régiment de la Sarre-infanterie, lesquels commanderont chacun une compagnie de milice; à quoi faire, le dit corps municipal nomme lesdits deux Messieurs les officiers, persuadés qu'ils voudront bien accepter le commandement .. Et au cas quelqu'un des dits deux messieurs les officiers fût obligé d'aller joindre son régiment, alors celui qui restera sur les lieux, aura en fait le commandement général des dites deux compagnies.

4.. "Messieurs les dits officiers sont priés et requis de la part du dit corps municipal et pour eux, Messieurs le Curé, Cantournet prêtre, Devez, syndic et Boysson, greffier de ladite assemblée qu'elle députe à cet effet, de vouloir une fois par semaine, instruire au fait des armes et faire suivre l'exercice de ladite milice, chacun à sa compagnie, afin que par l'exercice, la milice devienne propre à porter les armes et soit en force et pour trouble ny confusion en cas de besoin".

Cette longue citation montre à elle seule que le peuple de Marcolès n'a à cette époque aucune animosité ni aucun grief, mais plutôt beaucoup de vénération et d'estime pour la noblesse et le clergé. Il en sera de même durant toute cette période.

La milice bourgeoise ne tarde pas à prendre le nom de milice nationale ou de garde nationale.

L'année suivante, la milice prend part à la fête de la Fédération, qui doit avoir lieu à Marcolès, comme dans toutes les communes, en union de celle qui doit se dérouler au Champ de Mars, à Paris, le 14 juillet 1790.

A midi, après un "Veni Creator" chanté solennellement et une "messe haute au Saint Esprit", dans l'église paroissiale, en présence du procureur, du maire, des officiers municipaux, des notables et des citoyens actifs, ainsi que de la milice nationale "munie des armes à la main" a lieu, sur la place publique, la cérémonie de la prestation du "serment fédératif". "Le secrétaire de la municipalité ayant fait l'appel nominal de chaque garde national, suivant la liste qui en fut formée le 24 août dernier, se sont présentés les armes à la main Joseph Laborie, sergent-major, Antoine Exupère Boysson, Jacques Cantournet, Pierre Roquesolane, Jean Blanc, Jean Roquesolane, Antoine Peyrou, Antoine Vaurs, Jean Croizet, François Saingeal, Astorg Ros, Antoine Cantournet, Antoine Laborie, Louis Muratet, Jean Cantournet, François Piganiol, Pierre Garrouste, Pierre Boigues et Guillaume Destaing et autres absens, tous gardes nationalles (sic) de la dite ville et paroisse de Marcolez, lesquels ont prêté et renouvelé leur serment civique entre les mains dudit maire et officiers de la municipalité de cette ville et ont, l'un après l'autre et suivant l'appel nominal, juré d'être unis par les liens indissolubles d'une sainte fraternité, de défendre jusqu'au dernier soupir la Constitution de l'Etat, les décrets de l'Assemblée Nationale et l'autorité légitime de nos Rois". Vient ensuite le tour des citoyens actifs de prêter serment.

La garde nationale attend encore un an pour avoir son drapeau. Sa présentation solennelle par le curé de Marcolès Jean Guy Deconte a lieu le 23 juin 1791, jour de la Fête-Dieu, un peu avant la Grand'messe, dans l'église paroissiale. Toute la garde nationale commandée alors par Antoine Exupère Boysson était présente à la cérémonie.

A partir de ce jour jusqu'en 1801, le registre des délibérations de la commune ne parle plus spécialement de la garde nationale. Elle sert à la municipalité pour faire appliquer les arrêtés municipaux dans les cabarets ou pour opérer certaines perquisitions comme cela sera dit plus tard. Cependant, le 14 juillet 1793, nous pouvons noter que "précédée du drapeau national et au son du tambour", elle est de service dans l'église pour un Te Deum, puis , "sur la place publique de l'arbre de la liberté", pour célébrer la fête civile. Le 9 thermidor an II, c'est-à-dire le 27 juillet 1794, le commandant de la garde nationale est requis pour l'application du règlement de police et la poursuite des suspects. A partir de ce jour, il n'en est presque plus jamais fait mention dans les registres consultés.

Qu'est-elle devenue alors? Je l'ignore. Cependant il est bien permis de croire qu'elle devait être bien négligée, puisqu'il faut la réorganiser le 23 nivôse an IX, c'est-à-dire le 13 janvier 1801. Ce jour-là en effet, le maire, en vertu de l'arrêté du préfet du Cantal du 18 frimaire an IX, c'est-à-dire le 9 décembre 1800, convoque par affiche et au son du tambour, tous les citoyens de la commune âgés de 16 à 30 ans "pour réorganiser la Garde". L'empressement ne paraît pas grand. Après la prestation du serment de fidélité à la constitution de l'an VIII, les hommes sont divisés en 2 compagnies de 77 hommes chacune, à savoir un capitaine, un lieutenant, un sous-lieutenant, un sergent-major, 4 sergents, 8 caporaux, un tambour et 60 hommes.

Voici la liste de gradés des deux compagnies:

Première compagnie:

Capitaine: Hugues Devez de la Roque; lieutenant: Jacques Théron du bourg; sous-lieutenant: Jacques Lantuéjoul du bourg; sergent-major: Antoine Vaurs de Canet; sergents: Jean .. Fils, de Puniéjouls, Jean Puech, Pierre .. de Canet, Antoine Bouygue cabaretier; caporaux: Louis Falissard, Jean-Louis Falissard, Jean-Marie Cazal, Astorg Ros cuisinier, Baptiste Ros, François Lacquis tailleur, Guy Liaubet, Pierre Garrouste; tambour: Pierre Piganiol

Deuxième compagnie:

Capitaine: Jean Olivier officier de santé; lieutenant: Joseph Souquières d'Estieu; sous-lieutenant:Antoine Clary; sergent-major: François Saingeal, Jacques Clary, Jacques Devez de la Roque; caporaux: Pierre Cantournet de Garrigou (?); Antoine Alidières cordonnier, Antoine Milie, Pierre Valadou, Antoine Alexandre Bouquier, Jean-Pierre Devez de Vielcru, Hébrard du Bruel, Louis Bouquier de Vielcru; tambour: Antoine Fontanel

Après cette réorganisation, il n'est plus question de garde nationale dans le registre des délibérations de la municipalité.

Texte de Yvette Souquières - juin 2000